Malgré le ralentissement estival, force est de constater que l’actualité continue de générer des nouvelles fort intéressantes. Cette semaine, je ne retiens qu’un sujet (les autres attendrons…): Wirecard.
Le titre de l’article de CNBC est accrocheur: The Enron of Germany’: Wirecard scandal casts a shadow on corporate governance . Mais force est de constater que l’implosion de Wirecard, vu comme porte-étendard du potentiel des fintechs, épargne peu d’intervenants. Rappelons que la société fondée à la fin des années 1990 a fait son entrée à la bourse de Francfort en 2005, date charnière puisqu’elle acquiert alors une société qui lui permettra de se développer comme fournisseur de service de paiement. En 2015, le Financial Times (FT) amorce une série d’articles avec un titre évocateur – et prophétique: House ot Wirecard… Les articles vont bien entendu soulever des doutes quant à l’intégrité des états financiers. Ils n’empêcheront pas Wirecard de poursuivre sa croissance par voie d’acquisition pour devenir la plus important fintech d’Europe selon le FT. En 2018 et 2019, divers événements relevés par le FT continuent de soulever des doutes relativement à la situation financière de Wirecard. Puis, en avril 2020, un rapport d’audit extraordinaire remet en cause tout l’édifice en notant l’incapacité de confirmer que l’entente assurant l’essentiel des bénéfices de la société était authentique. Le 18 juin, alors que des enquêtes criminelles sont lancées, Wirecard annonce qu’elle ne peut « retracer » 1,9B d’Euros… Le résultat sur le cours du titre est catastrophique comme en fait foi ce graphique du Wall Street Journal.

Maintenant, les enjeux qui sont nombreux. Un premier concerne le régulateur allemand le BaFin pour avoir omis d’enquêter sur Wirecard après une descente policière dans les bureaux de la société à Singapour en février 2019. De fait, la situation est à ce point grave que les autorités européennes ont lancé une enquête sur le rôle du BaFin dans ce dossier. Un second concerne les auditeurs qui n’ont pas détecté cette fraude. Particulièrement troublant est l’omission d’obtenir la confirmation d’une banque de Singapour où Wirecard alléguait détenir 1B d’Euros de liquidités. Un troisième enjeu concerne la gouvernance. Plusieurs ont souligné la qualité du modèle rhénan qui ne place pas l’accent sur la maximisation de la valeur actionnariale. Toutefois, la passivité des conseils de surveillance et l’accent placé sur le consensus dans la gouvernance est questionnée, non seulement à la lumière du cas Wirecard, mais aussi de VW, de Siemens, etc. et d’autres sociétés. Enfin, qu’en est-il des investisseurs? Comment se fait-il qu’ils n’ont pas été plus sceptiques face aux résultats de cette société, comme le note un investisseur ayant vendu à découvert le titre: « Nothing surprised us except how long the stock went up and how gullible the median European large cap manager was, »
Si le scandale Wirecard est effectivement le moment Enron pour la gouvernance des sociétés en Europe, nous risquons de voir une cascade d’initiatives au cours des prochains mois. À suivre…