
Mine de rien, la Loi sur les valeurs mobilières du Québec célèbre cette année son 40e anniversaire, ayant été édictée en décembre 1982. Dans une série de billets publiés au courant des prochaines semaines, je reviendrai sur les grands jalons de son évolution en puisant dans mon ouvrage L’encadrement du secteur des valeurs mobilières par les provinces.
Débutons par une mise en contexte historique pour situer l’adoption de la Loi sur les valeurs mobilières dans le temps. Le Québec encadre le secteur des valeurs mobilières au moyen de lois particulières à tout le moins depuis le début du XXe siècle. En 1955, le législateur québécois vient consolider l’encadrement avec l’adoption de la Loi concernant les valeurs mobilières[1] qui s’inspire du Ontario Securities Act de 1945. Même s’il n’était pas exprimé explicitement, l’objectif principal de la loi de 1955 consistait en la protection des investisseurs, comme l’avait souligné le juge Fauteux dans l’arrêt Gregory[2].
Dans l’atteinte de cet objectif, la Loi concernant les valeurs mobilières avait recours aux mêmes techniques réglementaires que la législation ontarienne de 1945, à savoir l’inscription des personnes et des valeurs, la divulgation d’information, l’imposition de règles de conduite et les sanctions civiles, pénales et administratives.
La Loi concernant les valeurs mobilières crée la Commission des valeurs mobilières du Québec (ci-après « CVMQ ») et lui attribue le statut d’organisme de contrôle et de surveillance du secteur des valeurs mobilières. Pour encadrer le marché, la loi lui confie des pouvoirs de nature réglementaire, administrative et quasi judiciaire. Plus particulièrement, la Loi concernant les valeurs mobilières régit le marché au moyen de ces techniques en encadrant : (a) les personnes qui font commerce et assurent la distribution des valeurs, et (b) les valeurs elles-mêmes.
En 1966, sous l’impulsion du Rapport Kimber, le Parlement ontarien modernise sa législation en valeurs mobilières. Prenant appui sur les initiatives mises de l’avant jusqu’alors, le Ontario Securities Act de 1966 établit les principaux régimes d’encadrement du secteur des valeurs mobilières que nous connaissons encore de nos jours et dont la pierre angulaire est la divulgation. Ce choix en faveur de la transparence se reflète dans tous les régimes de la loi.
Motivé par un souci d’harmonisation et de mise en place d’un encadrement permettant de protéger les investisseurs et de promouvoir la confiance envers le marché, le Québec emboîte le pas à l’Ontario en 1973 avec une modification de sa législation en ces matières[3].
Avec le passage du temps, la Loi concernant les valeurs mobilières de 1955 s’avère de moins en moins adaptée aux nouvelles réalités du marché[4]. Certes, le législateur et la CVMQ ont cherché à assurer l’évolution de l’encadrement au cours des décennies suivant son adoption : le premier en adoptant des modifications législatives durant les années 1960 et 1970, la seconde en se servant de son pouvoir discrétionnaire lui permettant de formuler des politiques et d’ajuster ses pratiques aux exigences du marché[5]. Néanmoins, à la fin des années 1970, afin de pallier les lacunes de la loi de 1955, la CVMQ amorce une révision en profondeur de la législation québécoise en valeurs mobilières[6]. Les travaux mèneront à l’adoption en décembre 1982 de la Loi sur les valeurs mobilières dont les principes essentiels demeurent toujours en place[7]. La Loi concernant les valeurs mobilières de 1955 est par le fait même abrogée.
[1] Loi concernant les valeurs mobilières, L.Q. 1954-55, c. 11.
[2] Gregory & Co. c. Quebec Securities Commission, [1961] R.C.S. 584, 588.
[3] Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières, L.Q. 1973, c. 67, particulièrement les articles 22 et 26.
[4] Y. Caron, « Aspects du droit des valeurs mobilières (1971) », (1971) 17 R.D. de McGill 233, 290-291.
[5] M. Charbonneau, « La Commission des valeurs mobilières du Québec », (1977) 20 Adm. Pub. Can. 87, 95.
[6] A. Desaulniers, Commission des valeurs mobilières du Québec 1955-2004 un demi-siècle d’histoire, Institut de recherche en économie contemporaine, janvier 2004, p. 38, 39.
[7] L.Q. 1982, c. 48, entrée en vigueur le 6 avril 1983; L.R.Q., c. V-1.1 [ci-après « LVM »].